"...don't be stuck in the every day reality, allow yourself to dream, have faith in your wildest dreams." [AaRON]

"Ne restez pas scotchés à la réalité quotidenne. Permettez-vous de rêver. Croyez en vos rêves les plus fous..." [AaRON]

dimanche 14 avril 2013

LA COLLUSION DES "ELITES"


Il y a 15 ans, j'avais assisté à la conférence de Serge Halimi, fils de Gisèle Halimi, qui avait été organisée à Aubenas par le Carrefour laïque de mon ami Gilbert Auzias. Il avait aussi écrit un petit brûlot intitulé "Les nouveaux chiens de garde" (Ed. Liber/Raisons d'agir), sorti en 1997 et immédiatement épuisé.

Serge Halimi s'était livré à une démonstration sans concession de l’écœurant exercice de "renvoi d'ascenseur" auquel se livrent en permanence ce que l'on appelle "les élites" : il visait alors surtout le monde des médias (presse, radio, télévision) et leur collusion avec le pouvoir, qu'il soit de gauche ou de droite.

Les événements de ces derniers jours m'ont rappelé que j'avais toujours ce livre dans ma bibliothèque et je l'ai relu, du premier au dernier mot de ses 110 courtes (mais Ô, combien denses) pages. Et c'est effarant d'actualité ! Bien que 15 années se soient écoulées, on a l'impression, non seulement que l'on n'a pas avancé d'un pouce, mais que la situation est bien pire. Certes, certains ne sont plus au-devant de l'actualité comme ils l'étaient à l'époque mais on n'est pas dépaysés. Que l'on en juge à ces quelques citations :

- "L'un des supports invisibles de la pratique journalistique (est) l'amnésie (...) qui autorise en permanence les inconséquences et les incohérences, voire les virevoltes et les volte-face." (p. 7)

- "Un journalisme de révérence" (p. 13)

- "En France, l'imbrication croissante entre les groupes industriels et les médias ramène le pays à la situation qu'il a connue sous la Troisième République, et à laquelle le programme du Conseil national de la Résistance entendait mettre un terme en assurant "la liberté de la presse, son honneur et son indépendance vis-à-vis de l'Etat, des puissances d'argent et des influences étrangères." Un peu plus de 50e ans plus tard, des groupes comme Bouygues*, Matra-Hachette**, la Générale des Eaux***, Havas, la Lyonnaise des Eaux**** sont devenus, dans les médias, les héritiers du Comité des Forges de sinistre mémoire."

* Bouygues détient, outre TF1 et LCI, une 10e de chaînes de télé et 100% des journaux gratuits (dont Métro)
** Matra-Hachette, en fait le groupe Lagardère, détient pas moins de quatre titres de presse (Elle, Paris-Match, télé-7 jours, le JDD), 3 radios (Europe 1, Virgin radio, RFM) et une chaîne de télé (Gulli).
*** La Cie. Générale des Eaux est devenue Vivendi puis Veolia.
**** La Lyonnaise des Eaux est devenue le Groupe Suez.

- A l'époque "Le Wall Street Journal relevait l'existence en France "d'un circuit virtuellement fermé dans lequel le clientélisme politique et l'influence médiatique peuvent compter autant que la stratégie industrielle et le savoir-faire technologique." (p. 38)

On a beaucoup parlé, dans ces années-là, de "pensée unique". Pour ceux qui n'auraient jamais vraiment compris le sens de cette expression, voici la définition lumineuse qu'en donnait S. Halimi, citant le philosophe Ignacio Ramonet :

- "La pensée unique n'est pas neutre. (...) Elle traduit "en termes idéologiques à prétention universelle les intérêts du capital international." (p.46) et ceux qui sont chargés de l'imposer dans la conscience des peuples sont les institutions internationales, Banque mondiale, FMI, OCDE, GATT, OMC, etc. 

Il y aurait encore beaucoup à dire mais je préfère vous renvoyer vers ce passionnant petit ouvrage qui n'a, hélas, pas pris une ride car son analyse rigoureuse, même si elle demanderait à être un peu actualisée, est toujours parfaitement fondée.

On peut étendre ce que disait Halimi des journalistes à toutes les soi-disant "élites". N'êtes-vous pas frappés de retrouver toujours les mêmes personnes quelle que soit la chaîne de télévision ou de radio sur laquelle vous zappez, quel que  soit le journal ou la revue que vous lisez : ils sont interchangeables et utilisent le même langage jusqu'à l’écœurement. Il y en a assez !

Serge Halimi est actuellement directeur du Monde diplomatique.
   


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