Mon frère Yvon adorait (et adore toujours) cette chanson. Tout récemment, je l'ai trouvée sur Youtube illustrée d'une vidéo d'un bal sans doute tirée d'un film que je n'ai pas identifié. Les paroles de cette chanson, l'une des plus réussies du chanteur, ont été co-écrites par Polnareff et Pierre Delanoë mais la mélodie, appuyée par une musique d'orgue, est de Polnareff. Voici ce qu'en dit Bertrand Dicale, l'un des meilleurs spécialistes de la musique de variété française : « La mélodie au pas ample et élégant, le dialogue de l'orgue classique et de la basse électrique, l'ambiance du texte — mi-Lawrence, mi-Brontë —, tout est magnifique et révolutionnaire ».
Le bal des Laze (par Michel Polnareff)
Ma vie n'était pas faite
Pour les châteaux.
Tout est arrivé ce soir de juin
On donnait une fête
Dans le château.
Dans le château de Laze
Le plus grand bal de Londres
Lord et Lady de Laze
Recevaient le grand monde
Diamants, rubis, topazes
Et blanches robes longues
Caché dans le jardin
Moi je serrais les poings
Je regardais danser
Jane et son fiancé.
Je serai pendu demain au jour
Dommage pour la fille
De ce château.
Car je crois qu'elle aimait bien l'amour
Que l'on faisait tranquille
Loin du château.
Dans le château de Laze
Pour les vingt ans de Jane
Lord et Lady de Laze
Avaient reçu la Reine
Moi le fou que l'on toise
Moi je crevais de haine
Caché dans le jardin
Moi je serrais les poings
Je regardais danser
Jane et son fiancé.
Je serai pendu demain matin
Ça fera quatre lignes
Dans les journaux.
Je ne suis qu'un vulgaire
assassin
Un vagabond indigne
De ce château.
Dans le château de Laze
Peut-être bien que Jane
A l'heure où l'on m'écrase
Aura un peu de peine
Mais ma dernière phrase
Sera pour qu'on me plaigne
Puisqu'on va lui donner
Un autre fiancé
Et que je n' pourrai pas
Supprimer celui-là
(Paroles de Michel Polnareff et Pierre Delanoë, musique de Michel Polnareff)
Le Bal des Laze est le
deuxième album de Michel Polnareff, sorti en 1968. La chanson « Le
bal des Laze » figure en 10e position sur l’album bien qu’elle
lui donne son titre. Le parolier Pierre Delanoë signe là l'un de ses textes les plus
poétiques mais aussi les plus sombres. La chanson est l'équivalent d'une
confession, d'une autobiographie présentée à la première personne : un roturier
amoureux de Jane de Laze, une aristocrate anglaise avec laquelle il a eu une
liaison secrète, assiste, caché dans le jardin du château des Laze, au bal
donné en l’honneur des fiançailles de Jane et du prétendant que lui ont choisi
ses parents. Après avoir tué le fiancé, le narrateur est condamné à mort. À la
veille de son châtiment, il se désole de n’avoir pu tuer le nouveau fiancé de
Jane.
La chanson n’a pas eu un succès
immédiat car son thème, la mort d’un criminel qui ne se repent pas, a empêché
les radios de l’époque de la diffuser. Ils lui ont préféré une autre chanson du
même album, une pitrerie sans queue ni tête, « Y’a qu’un ch’veu »
qui est devenue, par la grâce des discothèques, le tube de l’été 1968, au grand
dam de Polnareff, qui croyait dur comme fer au succès (mérité) du Bal des
Laze.
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