"...don't be stuck in the every day reality, allow yourself to dream, have faith in your wildest dreams." [AaRON]

"Ne restez pas scotchés à la réalité quotidenne. Permettez-vous de rêver. Croyez en vos rêves les plus fous..." [AaRON]

vendredi 3 mai 2024

POESIE : LORSQUE L'ENFANT ETAIT ENFANT... (Peter HANKE)


Lorsque l’enfant était enfant 

Ce poème de Peter Handke traverse tout le film « Lesailes du désir » de Wim Wenders.  

 

Lorsque l’enfant était enfant,

Il marchait les bras ballants,

Il voulait que le ruisseau soit rivière

Et la rivière, fleuve,

Que cette flaque soit la mer.

 

Lorsque l’enfant était enfant,

Il ne savait pas qu’il était enfant,

Tout pour lui avait une âme

Et toutes les âmes étaient une.

 

Lorsque l’enfant était enfant,

Il n’avait d’opinion sur rien,

Il n’avait pas d’habitude

Il s’asseyait souvent en tailleur,

Démarrait en courant,

Avait une mèche rebelle,

Et ne faisait pas de mines quand on le photographiait.

 

Lorsque l’enfant était enfant, ce fut le temps des questions suivantes :

Pourquoi suis-je moi et pourquoi pas toi ?

Pourquoi suis-je ici et pourquoi pas là ?

Quand commence le temps et où finit l’espace ?

La vie sous le soleil n’est pas qu’un rêve ?

Ce que je vois, entend et sens, n’est-ce pas simplement l’apparence d’un monde devant le monde ?

Le mal existe-t-il vraiment avec des gens qui sont vraiment les mauvais ?

Comment se fait-il que moi qui suis moi, avant de le devenir je ne l’étais pas, et qu’un jour moi qui suis moi, je ne serais plus ce moi que je suis ?

 

Lorsque l’enfant était enfant,

lui répugnaient les épinards, les petits pois, le riz au lait

et la purée de chou-fleur.

et maintenant il en mange même sans être obligé.

 

Lorsque l’enfant était enfant,

Les pommes et le pain suffisaient à le nourrir,

Et il en est toujours ainsi.

Lorsque l’enfant était enfant,

Les baies tombaient dans sa main comme seule tombent des baies,

Les noix fraîches lui irritaient la langue,

Et c’est toujours ainsi.

 

Sur chaque montagne, il avait le désir d’une montagne encore plus haute,

Et dans chaque ville, le désir d’une ville plus grande encore,

Et il en est toujours ainsi.

Dans l’arbre, il tendait les bras vers les cerises, exalté

Comme aujourd’hui encore,

Était intimidé par les inconnus et il l’est toujours,

Il attendait la première neige et il l’attend toujours.

 

Lorsque l’enfant était enfant il a lancé un bâton contre un arbre, comme une lance,

Et elle y vibre toujours.

 

 

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