Ma vallée
Comme chaque matin, lorsque je me réveille, je vois, au-delà
de la vallée de l’Ardèche, dont le ruban argenté résiste à la sécheresse, le
col de l’Escrinet et celui de Mézilhac ombrés de brume. Le soleil qui se lève
les colore de rose. Plus tard, les teintes changent et, du rose tendre de
l’aube, prennent des tons de mauve puis de bleu.
L’air est léger, les martinets passent en sifflant, frôlant
les fenêtres. Je les envie de pouvoir ainsi fendre l’air tout en sachant que,
si c’est pour moi une joie, ce n’est pas pour eux un plaisir mais une nécessité
et, pour en avoir sauvés à plusieurs reprises, que leur vie est difficile et
dangereuse.
Hier soir, ils étaient si haut dans le ciel que l’on avait de
la peine à percevoir autre chose que leurs cris.
Après la pluie, la nature revit. Cette année, l’été a été
particulièrement chaud. La végétation maltraitée s’était repliée sur elle-même,
attendant, avec patience, une embellie qui tardait à arriver. Les feuilles
s’étaient recroquevillées, comme un livre qu’on referme, les fleurs ne
s’épanouissaient pas, privant les insectes de leur nectar.
Soudain, avec la pluie bienfaisante, elle revit, elle exulte
même, elle reprend des forces et nous en redonne.
Ce soir, l’ombre est venue, l’air vibre à nouveau des
sifflements des martinets. Jastres s’étire au-dessus de la rivière comme un
dinosaure épuisé. Le soleil du couchant caresse ses prairies desséchées et les
recouvre d’or.
(Aubenas, août 2022)
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