"...don't be stuck in the every day reality, allow yourself to dream, have faith in your wildest dreams." [AaRON]

"Ne restez pas scotchés à la réalité quotidenne. Permettez-vous de rêver. Croyez en vos rêves les plus fous..." [AaRON]

dimanche 3 octobre 2010

CINEMA : DES HOMMES ET DES DIEUX DE X. BEAUVOIS


Je viens de voir "Des hommes et des dieux" qui retrace les trois années de la vie des moines de Tibhérine, dans l'Atlas algérien, avant leur enlèvement et leur assassinat par un groupe extrémiste en 1996.

Je connais bien l'endroit pour y avoir passé quelque temps avec mon frère Yvon, pendant l'été 1970, et j'ai connu certains de ces moines. Le monastère Notre-Dame de l'Atlas est situé dans les montagnes qui dominent la grande plaine agricole de Médéa, à une 100e de km au sud d'Alger. J'ai conservé des moines, du peu de temps passé en leur compagnie, le souvenir d'êtres lumineux et chaleureux, qui vivaient en harmonie avec les paysans des alentours, dont certains travaillaient au monastère. L'annonce de leur enlèvement et l'injustice de leur mort m'a fait l'effet de perdre des amis.

Je craignais un peu de revoir les lieux (en fait, le film a été tourné au Maroc et je n'ai pas retrouvé le monastère que j'ai connu ni le paysage alentour) et d'être submergé par l'émotion.

Je suis partagé sur ce film. C'est un beau film, certes, mais je ne suis pas sûr qu'il mérite pour autant la palme d'or. Ceci dit, combien de films primés à Cannes ont, par le passé, vraiment mérité cette si prestigieuse récompense, surtout dans les dernières années ?

J'ai trouvé le ton du film relativement (mais pas totalement) juste. On ne peut pas dire qu'il fasse dans l'éloquence. Je m'attendais à retrouver une chose que ni la guerre, ni le malheur qu'ont traversés ces lieux, n'a pu effacer : la grandeur de l'Atlas, la beauté de la plaine de Médéa et surtout les extraordinaires couchers de soleil sur le Tamesguida, la "Montagne de feu" qui sépare à l'Ouest, Tibhérine de la plaine. C'était pour nous tous les soirs un spectacle qui valait tous les feux d'artifice du monde. Plus que les bâtiments, c'est là que l'on se rend compte que le film n'a pas été tourné à Tibhérine. Que le réalisateur n'ait pas pu tourner en Algérie, et encore moins dans cette région qui n'est, paraît-il, pas encore pacifiée, est compréhensible mais, sans pour autant recourir à la palette graphique, il aurait sans aucun doute pu trouver, dans le sud marocain, que je connais aussi, des paysages approchants, sans être aussi grandioses. Il nous répondra peut-être que tel n'était pas son but. Il y a, dans ce film, une volonté de dépouillement telle qu'elle confine presque à la platitude et sa lenteur, sans nul doute voulue, sans être comparable aux films de Theo Angelopoulos, donne par moments un sentiment d'ennui, ce qui n'est certainement pas le but visé par le metteur en scène. Certains spectateurs ont aussi dû être irrités par la trop grande place qu'y tient la religion. Il est vrai que mon séjour au monastère n'a pas été assez long pour en juger mais le souvenir que j'en garde, il est vrai à une époque et dans des conditions très différentes, n'est pas celui-là. La spiritualité des moines que j'ai connus était sincère, réelle, profonde, mais elle n'était pas aussi ostentatoire qu'elle apparaît dans le film. leur foi se révélait à travers les actes de la vie quotidienne : travailler la terre, s'occuper des malades, participer à la vie des villageois, se rendre à Médéa, choses qu'on voit bien sûr dans le film mais qui, à l'époque, étaient au centre de leur vie...  Les acteurs ne sont pas en cause (Michael Londsdale, qui joue le rôle de frère Luc, le médecin, avec juste assez de malice, est magnifique;  j'ai pris aussi beaucoup de plaisir à découvrir Jacques Herlin - le frère Amédée et quelques autres. Par contre, je n'ai pas du tout aimé le jeu de Lambert Wilson, qui fait plus "du Lambert Wilson" qu'il n'incarne le prieur Christian de Chergé).

Plusieurs scènes m'ont touché, sinon ému : celle où Michael Lonsdale conseille la jeune algérienne sur l'amour, celle du dialogue entre le chef islamiste et C. de Chergé le soir de Noël...  La plus belle scène, évidemment, qui restera inoubliable pour la plupart des spectateurs, est celle où Frère Luc, à la veille de l'enlèvement, ouvre deux bouteilles de vin que les moines dégustent en écoutant le "Lac des Cygnes", de Tchaïkovsky. On ne peut pas ne pas y voir une allusion à la Cène. Cela en a gêné certains. Pas moi car c'est le seul moment de grandiloquence que s'autorise le metteur en scène et il le fait avec une retenue qui l'honore.

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