"...don't be stuck in the every day reality, allow yourself to dream, have faith in your wildest dreams." [AaRON]

"Ne restez pas scotchés à la réalité quotidenne. Permettez-vous de rêver. Croyez en vos rêves les plus fous..." [AaRON]

mardi 9 octobre 2012

C'EST LA RENTREE LITTERAIRE

Photo Charles Platiau - Reuters (illustrant un art. de Libération) 

C'est la rentrée littéraire. Selon le dossier que consacre France Inter à la rentrée 2012, c'est 646 romans français et étrangers que vont, cette année, recevoir les libraires. Qu'est-ce que je suis content de ne plus être libraire !!! Je l'ai été pendant 20 ans. J'ai aimé ce métier, j'ai essayé de le faire sérieusement et avec conscience, essayant de lire le maximum de livres, de conseiller au mieux mes clients (dont beaucoup sont devenus des amis) mais, lorsque j'ai quitté la librairie, fin 2006, cela a pour moi été un soulagement tant le système m'était devenu insupportable. Cette inflation de livres, ce "turn-over" dément qui faisait que, si un livre ne s'était pas vendu au cours de sa première semaine d'exposition, on devait le remettre en rayon, puis en cartons, en attendant de pouvoir le retourner et, à ce moment là (il m'est même arrivé de devoir rouvrir des cartons prêts à être repris par le transporteur) se l'entendre réclamer car l'éditeur avait réussi à faire parler de lui dans une quelconque émission de radio, de télé, ou que le client avait lu une critique favorable dans une revue...
Cela était devenu tragique. Non à cause, comme on le lit souvent, de la baisse de qualité de la filière dans son ensemble (de l'auteur qui ne sait plus écrire, aux correcteurs, qui pour des raisons budgétaires, n'existent plus, qu'aux imprimeurs ou à ceux qui se prétendent éditeurs et ne le sont pas...) mais au système qui tourne en roue libre et est dominé par une seule chose, désormais, le FRIC, comme hélas, pour presque tout le reste de notre société.
Cela me faisait toujours beaucoup rire quand les "prix littéraires" étaient décernés. Tous les libraires savent que trois maisons dominent le marché : Gallimard-Grasset et Le Seuil. Dans le métier, on les surnomme "Galligraseuil" (Gallimard-Grasset-Le Seuil). Et, pour ne pas pleurer, je riais quand les commentateurs s'extasiaient que"pour une fois, le prix x ou y ait été décerné aux... éditions de Minuit" - qui font partie intégrante des éditions du Seuil (C'est un exemple, cela aurait pu être aux éditions Quai Voltaire qui, elles, font partie du groupe Gallimard).  
Mais ces réflexions étaient encore valables lorsque j'ai quitté le monde de la librairie car, maintenant, avec l'entrée des financiers dans le jeu tordu de l'édition, cela doit être encore plus glauque et la qualité littéraire des auteurs ne doit plus avoir grand chose à faire avec le chiffre de leurs ventes.
Actuellement, l'édition est liée au grand capital qui place autant ses billes dans le monde de l'industrie, de la pharmacie, ou de la sidérurgie (la liste n'est pas limitative).
En outre, il faut aussi compter sur le passage au numérique. Est-ce un bien, un mal ? Je ne sais pas. La numérisation par Google des livres épuisés tombés dans le domaine public est, à mon avis, une bonne chose car certains ouvrages étaient devenus inaccessibles. Les chercheurs comme moi ne peuvent que saluer cette initiative.
La lecture sur tablettes numériques peut aussi rendre de grands services aux mal-voyants puisqu'une fois le livre téléchargé on peut en agrandir les caractères et les lire plus facilement.
Quant au reste : je reste fidèle au papier car rien ne remplacera jamais (du moins pour moi) le fait de pouvoir tenir un livre, en tourner les pages,  revenir sur un passage, l'annoter... (bien que tout cela soit aussi possible sur les tablettes numériques).
Tout cela pour vous dire que je ne regrette pas, non vraiment pas, de ne plus être libraire et de ne plus entendre mes clients (même les plus cultivés, les mieux intentionnés) me réclamer "le dernier Besson, le dernier Amélie Nothomb, etc." Cela aurait fini par un meurtre !

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